BmN Kiosque lorrain

L'Est républicain du mardi 12 mars 1912

Sur le plateau de Malzéville

Une Revue a lieu jeudi prochain - Fleurs et aéroplanes de France

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Au lendemain de l'éclatante manifestation où s'est exalté le patriotisme ardent de Paris, une revue des troupes du 20e corps va être passé dans l'Est :

La garnison tout entière de Nancy, la division de cavalerie indépendante de Lunéville, les 2e et 4e bataillons de chasseurs venus de Lunéville et de Saint-Nicolas, défileront, jeudi prochain, à 2 heures après-midi, sur le plateau de Malzéville, devant le général Gœtschy.

C'est là une cérémonie militaire à laquelle Nancy assistera pour acclamer les troupes de la frontière et pour montrer qu'un immense et profond écho répercute ici l'immense ovation de Vincennes.

Employés, ouvriers, humbles commis de magasin, le peuple des ateliers qui vibre avec tant d'enthousiasme, qui aime avec tant de passion, qui espère avec tant de force, graviront le plateau comme en un sacré pèlerinage. La ferveur égale de leurs aspirations confondra les classes sociales et cimentera l'inébranlable union des cœurs français.

On pourra seulement regretter qu'une telle solennité n'ait pas lieu par un clair et joyeux dimanche de printemps ; mais on devine aisément l'accueil qui serait fait à l'initiative de la fédération des commerçants, si elle proposait la fermeture des boutiques, en octroyant au personnel un congé de quelques heures !

Nous avons décidé, à l'occasion de cette grande revue, la mise en vente des roses tricolores et des oiseaux de France, — ces mignons et légers aéroplanes si rapidement adoptés par tous ceux qui arborent ainsi visiblement l'insigne de leur confiance dans les glorieux succès de l'aviation.

Fleurs et oiseaux de France orneront les vestons et les corsages. Personne ne se soustraira aux offres de nos jeunes et souriantes vendeuses qui rivaliseront entre elles pour grossir une recette destinée à développer l'action de la défense nationale.

Nous adressons un nouvel appel à nos aimables collaboratrices. Elles mirent récemment au service d'une cause noble et belle un zèle infatigable, un dévouement empressé et leur activité se traduisit en une pluie de pièces d'or. Près de deux mille francs furent recueillis en deux jours.

Il dépend d'elles que, jeudi prochain, la souscription soit couronnée d'un succès aussi considérable. Des automobiles les aideront dans l’accomplissement de leur tâche patriotique et leur en épargneront la fatigue.

Des coupe-files spéciaux seront délivrés sans nul doute par l'autorité militaire qui s'inspirera elle-même, dans cette circonstance, du sentiment qui rapproche si étroitement la France de son, armée. Dans le vaste cadre où elle se déroule, en raison de l'importance des troupes qu'elle rassemble, la manifestation de jeudi revêt une signification sur le caractère et sur la portée de laquelle il est inutile d'insister.

En arborant l'  « oiseau de France » comme un emblème de ralliement, les Lorrains montreront unanimement qu'ils se reconnaissent entre eux à la communauté de leurs espoirs, à l'indestructible unité de leur patriotisme, à leur amour pareil d'un drapeau au-dessus duquel les aigles n'ont cessé de voler que pour céder leur part de ciel aux aéroplanes.

L. C.

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L'ordre de la Revue

Revue de printemps - Plan des troupes sur le plateau de Malzéville

La place de Nancy nous communique La note suivante :

« M. le général, commandant le 20e corps d'armée, passera le 14 mars 1912, à 2 heures de l'après-midi, sur le plateau de Malzéville, la revue des troupes des garnisons de Nancy, Lunéville et Saint-Nicolas-du-Port. MM. les officiers de la réserve et de l'armée territoriale sont invités à assister à cette revue.

Après le défilé des troupes, la division de cavalerie exécutera une marche en bataille au galop vers le général commandant le corps d'armée, et reprendra son emplacement de revue. Après cette charge, la 11e division d'infanterie exécutera une marche

en bataille dans la même direction. Il est donc essentiel, pour la sécurité de tous, que les cordons de sentinelles ne soient rompus, sous aucun prétexte, jusqu'à la fin de la revue.

Afin de ne pas entraver l'exécution de ces différents mouvements et éviter des accidents, l'accès du terrain sur lequel seront, formées et évolueront les troupes, pour la revue et pour les marches en bataille, sera rigoureusement interdit.

Les piétons qui voudront assister à la revue, pourront se rendre aux abords du baraquement du plateau, sur un emplacement qui leur sera réservé, soit par le village de Malzéville, soit par le chemin stratégique de la GueuIe-du-Loup.

Les voitures et autos devront gagner le plateau par le chemin stratégique de la Gueule-du-Loup, et seront groupées au débouché de ce chemin par les soins de la gendarmerie ; il y a intérêt pour ces voitures à être rendues sur Le plateau à 1 heure et demie. »


BmN Kiosque lorrain

L'Est républicain du mercredi 13 mars 1912

Une grandiose manifestation se prépare pour jeudi, sur le plateau de Malzéville

DÉFILÉ ET CHARGES

Les Aéroplanes viendront

Ce que dit M. le général Gœtschy

Le général Poline

Le général Poline

On sait le généreux désir qui anime instamment M. le général Gœtschy, soucieux avant toutes choses de créer entre la population nancéierme et les troupes qu'il commande un lien plus étroit, plus intime, plus profond.

En ces derniers temps, des vœux furent exprimés en faveur des revues militaires qui seraient passées le dimanche ; puis d'autres vœux réclamèrent des musiques militaires et des retraites aux flambeaux pour les fêtes de Pâques ; enfin l'immense mouvement qui a emporté la France entière vers l'accroissement de notre flotte aérienne a inspiré des vœux nouveaux :

— Nous avons souscrit pour l'aviation, disaient les Nancéiens... Le département de Meurthe-et-Moselle fera cadeau à l'armée de plusieurs avions dont nous saluerons tôt ou tard la venue sur la frontière. Avant que ce glorieux événement se ce produise, avant que jaillisse de toutes nos poitrines un cri d'allégresse et d'enthousiasme, ne pourrait-on, comme à Vincennes, voir au-dessus de la revue évoluer des aéroplanes ?...

Oh ! non pas six biplans, non pas trois monoplans, non pas même deux dirigeables... Nancy se montre moins exigeant. A la rigueur, deux aéroplanes suffiraient pour combler de joie le public :

— L'étendue du plateau de Malzéville, les dispositions du service d'ordre, ajoutait-on, permettraient de réaliser ce projet...

Que pensait de ces différents vœux le général Gœtschy ? Dans quelles mesures l'autorité militaire était-elle capable de les exaucer et de donner ainsi satisfaction aux nobles sentiments, au patriotisme du meilleur aloi dont la magnifique exaltation avait dû émouvoir le commandant en chef du 20e corps d'armée ?

Nous sommes allé, dans ce but, interviewer mardi matin M. le général Gœtschy au palais du Gouvernement, où nous avons la bonne fortune de le rencontrer à son retour des obsèques du lieutenant Broutin.

— Passons d'abord aux revues du dimanche. Les règlements sont formels. Impossible d'obtenir une dérogation, à moins qu'elle n'émane du ministre de la guerre... Passons maintenant aux fêtes de Pâques au profit de l'aviation. Pour les mêmes raisons, je vous ferai la même réponse, en ajoutant que les musiciens, les soldats et leurs officiers ont coutume, à Pâques, de jouir de permissions dont je n'ai pas le droit de les priver et que je ne me sens nulle envie d'abréger ou de troubler...

Cette décision aura pour effet de laisser sans musiques militaires le meeting d'aviation ; mais les sociétés philharmoniques de Nancy combleront cette lacune.

Le général ajouta :

— Je comprends cependant les désirs de la population nancéienne et, pas plus tard qu'hier, après mûre réflexion, j'ai résolu d'accorder mon autorisation à une retraite aux flambeaux avec les musiques de la garnison pendant la soirée de jeudi prochain.

En ce qui concerne la revue des troupes sur le plateau de Malzéville, M. le général Gœtschy a multiplié ses instructions en vue de faciliter l'accès du terrain aux milliers de spectateurs qui veulent acclamer notre armée.

L'idée d'un congé, entre midi et quatre heures, au personnel, des magasins et aux ouvriers des ateliers et grandes manufactures, a fait son chemin dans les milieux du commerce et de l'industrie. Le principe est admis. Plusieurs patrons nous ont écrit :

— Si nous étions sûrs que des aviateurs se rendront à Nancy, nous fermerions volontiers nos usines et nos bureaux pendant quatre ou cinq heures... Seulement, il faudrait que nous fussions prévenus assez tôt pour cela.

De nombreuses correspondances témoignent qu'aux pays annexés l'enthousiasme est aussi grand. L'affluence des voyageurs serait énorme aux trains de Strasbourg, de Château-Salins et de Metz.

Mais les aéroplanes voleront-ils jeudi ?

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Nous abordons le côté palpitant de l'interview :

— Est-ce que des aviateurs militaires ne pourraient venir jeudi, soit de Mourmelon, soit du camp de Mailly ? Ils partiraient dès le matin ; ils s'arrêteraient à Toul ; puis, vers deux heures, ils reprendraient leur vol pour Nancy... Ils regagneraient Toul, après avoir évolué au-dessus de notre ville et au-dessus des troupes... Tel est, mon général, le programme qui séduirait toute la population...

Malheureusement, l'exécution d'un tel plan ne dépend pas du général en chef... Il entre, à ce sujet, dans des explications dont nous retiendrons seulement les principales :

— Le camp de Mailly est sous mes ordres, nous dit M. le général Gœtschy ; mais les aviateurs qui s'y trouvent actuellement sont placés sous les ordres du général Maunoury, gouverneur de la place de Paris.... Seul, le ministre de la guerre pourrait donc combler les vœux des Nancéiens, en invitant le général Maunoury à envoyer ici deux ou trois aviateurs.

On sait d'autre part, que le dirigeable « Adjudant Vincenot », par suite d'accidents survenus à son enveloppe, a été dégonflé à Toul, où, sous son hangar, la nacelle .attend la fin des réparations indispensables.

Est-ce à dire qu'il faille, par conséquent, renoncer définitivement à tout espoir d'apercevoir dans le ciel lorrain les merveilleux oiseaux pour l'achat desquels tant de pauvres bas de laine ont souscrit ?

Une démarche ne sera-t-elle point tentée, une pétition ne sera-t-elle pas adressée ? Nous nous garderons avec soin de toute indiscrétion pour le moment...

Mais, à coups hâtifs et précis de crayon bleu, voici que, maintenant, le général Gœtschy trace, sur une feuille de papier, un croquis :

— Je vais indiquer sommairement les dispositions du service d'ordre, nous dit-il. La revue, le défilé, les charges, telles sont les trois phases de la cérémonie militaire de jeudi prochain. Il importe que le public en soit avisé, afin que personne ne cherche à rompre les barrages avant la fin.

« L'allée de pommiers qui part des baraquements du 26e de ligne trace la limite de l'enceinte réservée aux spectateurs. Je me tiendrai à la hauteur des derniers arbres, sur la droite, ayant en face de moi les troupes, dont le front dessinera un angle obtus. Je passerai à cheval devant les troupes qui se masseront ensuite pour défiler et se préparer aux charges.

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Le général en chef attise notre attention sur tes dispositions particulières et sur les consignes spéciales ayant pour objet de prévenir les moindres incidents :

— Le public devra se laisser docilement refouler vers les baraquements militaires, dit-il. Un vaste espace nous est nécessaire. Il faut, par conséquent, dégager complètement le terrain de manœuvres aux abords mêmes de l'allée des pommiers. Je me porterai en arrière, avec le régiment de hussards qui m'escorte, sur la droite. La cavalerie de Lunéville, déployée, chargera sur moi et, dès qu'elle se sera repliée, l'infanterie, en masse .compacte, s'avancera à son tour, baïonnette au canon, prête pour un suprême et formidable assaut.

Tandis que cette ruée d'hommes ébranlera le sol du plateau et fera retentir les échos de ses clameurs de victoire, les batteries d'artillerie garniront rapidement la crête.

— C'est la première fois qu'à Nancy, je crois, un pareil spectacle sera offert, déclare le général en chef... Quand les régiments d'infanterie et les bataillons de chasseurs du corps d'armée seront à cinquante mètres de moi, tous les canons tireront ensemble, soulignant ainsi cette imposante manifestation.

M. le général Gœtschy se propose, au surplus, de retourner dans l'après-midi sur le terrain afin de régler avec une impeccable précision, les trois phases de la cérémonie...

D'autre part, le service de la place a l'intention de communiquer à la presse un plan dont la publication renseignera exactement les curieux et rendra plus commode la tâche si compliquée et si délicate des services d'ordre.

Des coupe-files spéciaux seront délivrés. — Les vendeuses de Roses et d'Oiseaux de France, déléguées par l' « Est républicain », pourront circuler librement ; elles porteront un brassard tricolore avec les initiales E. R du journal imprimées en caractères dorés.

En prenant congé de M. le général Gœtschy, le chef du 20e corps d'armée résume l'entretien :

— Vous voyez que je fais tout mon possible, dit-il en souriant, pour que les Nancéiens soient contents. »

Achille LIÉGEOIS.

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Aéroplanes Militaires a la Revue du plateau

NANCY, 12 mars, 4 heures soir. — Au moment de mettre sous presse, nous apprenons qu'une section d'aviation militaire de Châlons-sur-Marne, viendrait jeudi planer pendant la revue au-dessus du plateau de Malzéville, si le temps le permet.

Cette section serait sous les ordres du lieutenant-aviateur Cheutin, du 94e à Bar-le-Duc.

Elle ferait escale mercredi soir à Toul où les appareils seraient remisés dans le hangar des, dirigeables de Dommartin.

A suivre…


BmN Kiosque lorrain

L'Est républicain du jeudi 14 mars 1912

Sur le plateau de Malzéville

Aujourd'hui jeudi les soldats de la garnison de Nancy, les cavaliers, les artilleurs vont sur le plateau de Malzéville, sous le soleil ou sous la pluie, dans une atmosphère apaisée ou contre la violence du vent, montrer ce que peut une discipline vaillamment acceptée quand elle est unie à un entrain naturel. Peut être dans le ciel, au-dessus des troupes correctement alignées, planera le vol protecteur des avions militaires.

Il y a quelque temps cette manifestation eût certes fait grand plaisir au public qui peut assister à des cérémonies de ce genre. Mais elle n'eût excité que la joie des yeux, et n'eût remué au fond des cœurs que des sentiments un peu pâlis.

Aujourd'hui que la nation, dont l'esprit s'est éveillé d'un trompeur assoupissement, a réfléchi sur les dangers de la torpeur, elle est prête à honorer davantage les citoyens qui, revêtus de l'uniforme, sont armés pour le service de la patrie. D'avoir vu le péril de tout près nous avons compris que rien ne pouvait plus séparer le peuple de la République ni de l'armée.

Il n'y a pas, on peut l'affirmer hautement, deux sortes, de citoyens, les civils et les militaires comme se plaisaient à l'insinuer les nationalistes, il y a partout de bons Français qui se sont groupés autour du drapeau national.

Certes notre patriotisme n'est pas agressif. Il a perdu ce caractère bourru et malveillant qui l'avait un instant rendu insupportable. Il est calme comme la force et tranquille comme la raison. Il n'en est que plus ardent.

Et ce soir, quand les cavaliers chargeront, quand les fantassins monteront à l'assaut, quand les artilleurs feront tonner les canons, quand les aviateurs tourneront au-dessus de l'armée, la foule enthousiaste n'acclamera pas l'œuvre de mort et de destruction, elle acclamera les hommes qui de leurs armes font un rempart autour de l'existence nationale.

RENÉ MERCIER.

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La Revue de Printemps au plateau de Malzéville

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Le général de Mas-Latrie commandera les troupes. — L'ordre de bataille. — Les chefs

Les services d'ordre pendant la revue et pendant la retraite aux flambeaux

L'impression en ville. — Cartes postales et Oiseaux de France.

Au moment où la nature s'éveille dans la poussée du renouveau, où les hommes, fils de la terre, se sentent plus forts, plus alertes, plus courageux, nos grands chefs veulent avoir l'impression d'ensemble des forces redoutables placées sous leur haut commandement.

La semaine dernière, M. le général Gœtschy a ainsi passé en revue la division d'infanterie, de Toul, et la 20e brigade de cavalerie dans le rude cadre du plateau d'Écrouves, sur l'éperon qui domine Pagney et Bruley.

Cette revue fut sans apparat ; elle n'eut pour spectateurs que quelques rares paysans maintenus au loin par le cordon des sentinelles.

Le plateau d'Écrouves est le terrain habituel des évolutions de la division Defforges. Le plateau de Malzéville est, on le sait, la place d'entraînement de la division Poline.

Demain, la 11e division d'infanterie et la 2e division de cavalerie indépendante y seront longuement acclamées par les Nancéiens enthousiastes.

Nous verrons apparaître, à deux heures précises, dans l'immensité du plateau, la fine, silhouette du général Gœtschy, qui sera accompagné du colonel breveté hors cadres Bertrand et de son état-major.

Les troupes seront présentées par le plus ancien divisionnaire, le générai de Mas-Latrie, de Lunéville.

Ce nom de Mas-Latrie est justement populaire dans la cavalerie française. Merveilleux homme de cheval, le général de Mas-Latrie est le digne successeur des Cointet et des Benoist.

La cavalerie

La division de cavalerie sera commandée par le général Varin, commandant la 2e brigade de dragons.

Le général Varin est un de nos plus jeunes généraux de cavalerie ; il a été l'émérite écuyer en chef de Saumur.

La 2e brigade de dragons sera commandée par le colonel Claret, du 9e, ayant sous ses ordres le 8e de la subdivision d'arme, colonel Macé de Gastinies, et le 9e, lieutenant-colonel Salmon de Loray.

La brigade de chasseurs aura à sa tête le général de Contades-Gizeux, qui a succédé récemment au général Besset.

17e chasseurs, lieutenant-colonel Harau (le colonel Scourion de Beaufort, qui a pris prématurément sa retraite n'est pas remplacé).

18e chasseurs, lieutenant-colonel de Guiteau (le colonel Laperrine d'Hautpoul, l'oranisateur des oasis sahariennes étant en ce moment malade chez son frère à Rome).

Les batteries volantes de la division de cavalerie seront sous les ordres d'un officier supérieur portant un nom illustre dans les fastes de notre marine : le chef d'escadron Jauréguiberry.

L'infanterie

Passons maintenant à l'infanterie. La 11e division sera commandée par le général de division Poline, notre, distingué compatriote.

21e brigade. Colonel breveté Kaufmant, commandant par « intérim ».

Un Lorrain de Corny, où il est né le 8 février 1854, vient du 155e, a succédé au général Balfourier.

69e Lieutenant-colonel breveté Duchêne, commandant par « intérim ». Né à Juzennecourt (Haute-Marne), le 23 septembre 1862.

Le colonel Duchêne a appartenu à l'état major de la. 14e division. En dernier lieu, il faisait partie de l’état-major du 20e corps.

26e d'infanterie. Colonel breveté Grossetti.

Le successeur du colonel Sibille au 26e a déjà acquis à Nancy de très nombreuses sympathies. Lui aussi est un de nos plus distingués officiers d'état-major.

Il est né à Paris en septembre 1861. Il était lieutenant-colonel dans les Alpes lorsqu'il fut appelé au commandement du beau 26e.

Les petits « vitriers » de Saint-Nicolas, sont rattachés à la 21e brigade. Leur nouveau commandant, le chef de bataillon breveté Lacapene, est né à Troyes en 69 il a été capitaine à l'état-major de la 25e division, puis commandant au 91e à Mézières.

Le général Poline

22e brigade. d'infanterie.. Colonel commandant par « intérim » colonel breveté Lefèvre. Né à Bar-le-Duc le 26 avril 1857, est l'ancien lieutenant-colonel du 113e.

37e Colonel Varlet.

Le colonel Varlet est un des rares officiers en activité de l'armée française qui puisse porter sur sa poitrine la médaille de 70. Il est entré au service, en effet, le 2 décembre 1870. Il était sous-lieutenant le 1er septembre 1871 et lieutenant en 75 à 22 ans.

Le colonel Varlet servait comme lieutenant-colonel au 137e, à Fontenay-le-Comte, lorsqu'il succéda au colonel Bajolle, maintenant général à Toul.

Colonel breveté Gérôme. Un Lorrain de Badonvillor, ancien chef d'état-major du 20e corps.

Le 2e bataillon de chasseurs, de Lunéville, est commandé par le commandant Le Bouhélec. Le commandant Le Bouhélec est né à Lille en octobre 1865. Il a été instructeur à Saint-Cyr et a conservé sous le képi à quatre galons l'allure juvénile d'un sous-lieutenant.

Hussards et artilleurs

Nous verrons encore défiler le 5e hussards : colonel Boutaud de Lavilléon. Cet excellent officier supérieur a passé dans l'Est une partie de sa brillante carrière ; il a été capitaine au 12e dragons, chef d'escadrons au 5e hussards, où il est revenu avec grand plaisir comme chef de corps.

Le colonel d'artillerie breveté Déprez commandera les magnifiques batteries du 8e.

Tel est l'ordre de bataille, tels sont les chefs des troupes dont le cœur battra demain sur noire « bastion de l'Est ». Rappelons qu'elles ne participeront pas à une simple parade, mais qu'elles serviront encore à l'exécution d'un thème tactique.

Nous verrons donc unis, selon l'expression très juste d'un de nos officiers, « la sentimentalité aiguisée et le génie militaire toujours en quête des moyens d'action les plus modernes ».

Et la fête sera complète si les aéroplanes viennent dans le ciel de Lorraine pousser leur vol rapide, d'allégresse et d'espoir.

LÉON PIREYRE.

Les cantonnements de la garnison de Lunéville

Le 2e bataillon de chasseurs a quitté Lunéville mercredi après la soupe du matin.

Cantonnement à Saulxures pour les compagnies à pied ; à Pulnoy, pour la compagnie cycliste.

Jeudi, départ du cantonnement pour le plateau de Malzéville, vers onze heures du matin. Après la revue, retour au cantonnement et vendredi rentrée à Lunéville.

La cavalerie, elle, part jeudi matin à la première heure et cantonne après la revue pour revenir à Lunéville vendredi.

Après la revue, l'état-major de la division et de la brigade de dragons, l'artillerie de la division et un escadron du 9e dragons iront cantonner à Saint-Nicolas ; les trois autres escadrons de ce régiment cantonneront à Varangéville ; le 8e dragons à Art-sur-Meurthe et Lenoncourt ; le 18e chasseurs à Buissoncourt et Cercueil.

La division rentrera à Lunéville, comme nous le disons plus haut, vendredi matin.

Une manœuvre préparatoire de la brigade de dragons a eu lieu mercredi matin au Champ de Mars de Lunéville, sous le commandement du général Varin, à sept heures et demie du matin. Manœuvre de brigade et exercices de préparation à la revue.

Consignes sévères

M. le général Poline, commandant la 11e division, s'est longuement entretenu mercredi matin avec le lieutenant-colonel Lormeau, major de la garnison ; il avait convoqué, en outre, à son hôtel de la place Carrière, les officiers sur qui repose la responsabilité d'un service d'ordre d'une exceptionnelle importance.

Les barrages militaires, — composés à la fois de toute la gendarmerie et d'imposants détachements d'infanterie et de cavalerie seront établis sur une longueur d'environ trois kilomètres. Des consignes très sévères seront données, en raison des dangers auxquels serait exposé le public, pendant les charges de cavalerie.

Nous jugeons utile de publier le passage suivant d'une lettre que nous a envoyée hier M. le général Gœtschy :

— Le public, nous écrit le général, sera admis à circuler librement sur tout le terrain qui ne sera pas réservé pour les mouvements de troupes nécessités par la revue, le défilé et les charges finales.

« J'estime qu'il n'y aurait pas d'utilité à délivrer des coupe-files spéciaux à vos vendeuses, dont la tâche, très digne d'éloges, ne saurait en aucune façon être facilitée par ces coupe-files. »

Comme on peut ainsi s'en rendre compte, on accorde aux Nancéiens toutes les libertés compatibles avec les exigences d'un service d'ordre destiné-à protéger leur sécurité.

Dès jeudi matin, un immense mouvement poussera les foules vers les hauteurs du plateau de Malzéville.

Mais tout le monde se pose évidemment la même question :

— Où faudra-t-il se poster pour avoir une bonne place ? »

C'est un conseil qu'ont déjà sollicité avec nous bon nombre de lecteurs.

Il est aisé de prévoir que les spectateurs afflueront surtout aux abords des baraquements du 26e de ligne. Cela signifie-t-il que ce soit la meilleure place ?

Les postes de secours, les ambulances seront installés sur le Plateau. Souhaitons que l'on n'ait point à utiliser le zèle des brancardiers.

L'impression en ville

Dans la soirée, on annonçait que les aviateurs viendraient du camp de Mailly ou du parc de Mourmelon. Le passage du lieutenant de Rose au-dessus de Nancy et son atterrissage à Varangévilile avaient contribué à créer dans l'opinion publique le courant qui porte rapidement les esprits vers la réalisation sans obstacles de ce qu'ils considéreraient en d'autres temps comme une lointaine et insaisissable chimère :

Les aéroplanes viendront peut-être à la revue de Malzéville... avait-on d'abord avancé avec des réticences et des timidités.

— Les aéroplanes s'abattront jeudi comme une splendide escadrille... affirmait-on partout, dans la soirée de mercredi, avec la conviction que rien ne serait capable d'infliger à cette nouvelle un funeste démenti.

On citait maintenant le nom du lieutenant Cheutain, à qui l'on prêtait, sans la moindre hésitation, la pensée de diriger une escadrille d'avions.

Hélas ! ni Cheutain ni un autre ne fera son apparition en Lorraine et ne tirera son appareil du hangar dans le but de prendre part en service commandé à l'éclatante manifestation du plateau de Malzéville.

Une déception frappera tout le monde mais elle ne blessera ni n'affaiblira la foi patriotique dont vibrent si ardemment tous les cœurs.

En réfléchissant un peu, il est aisé de se rendre compte qu'on ne mobilise point en trois ou quatre heures les monoplans et les biplans auxquels l'autorité militaire demanderait une randonnée de 200 à 300 kilomètres.

Quoi qu'il en soit, de nombreux commerçants se proposent de pavoiser aujourd'hui en l'honneur d'une revue qui a revêtu par un jeu inattendu de circonstances, le caractère, la portée et la signification d'une fête grandiose de la Patrie et de l'Armée.

Avant de regagner leur domicile, des noctambules envisageaient avec une aimable philosophie le fâcheux contre-temps et se consolaient en disant :

— N'importe ! la journée sera bonne pour les cochers et pour les chauffeurs d'automobiles.

Pour les cafetiers aussi, pour les restaurateurs également, qui eurent l'originale idée d'avancer aujourd'hui l'heure du déjeuner, afin, que leur clientèle puisse escalader « pedibus cum jambis » le Plateau — histoire de faire hygiéniquement un brin de footing après le repas.

Nos petits soldats n'y perdront ni une ovation, ni un applaudissement.

Les aviateurs ne viennent pas

Dans l'interview du général Gœtschy, publiée par l' « Est républicain », le commandant du 20e corps d'armée formulait des regrets de ne pouvoir montrer à la population le beau spectacle d'aéroplanes évoluant sur le plateur de Malzéville au moment de la revue. Seul, dit-il, le ministre de la guerre peut ordonner le déplacement des avions de guerre que les Nancéiens auraient été si heureux pourtant d'acclamer.

L' « Est républicain », se faisant l’interpréte de ce désir patriotique, a fait prier M. Lebrun, ministre des colonies, d'intervenir à ce sujet auprès de M. le ministre de la guerre.

Malheureusement, nous avons appris, mercredi soir, que M. Millerand, à son grand regret, ne pouvait l'épondre au désir dont le ministre des colonies s'était fait l'interprète, le délai matériel étant maintenant trop court en raison des préparatifs indispensables à une longue et imprévue randonnée aérienne et aussi en raison des troubles atmosphériques qui se sont manifestés si violemment mercredi soir.

Maintenant nous caressons l'espoir que le lieutenant de Rose, qui atterrissait hier à Varangéville, nous fera l'aimable surprise, si le temps le permet, d'une pointe sur le plateau. Mercredi, après avoir volé de Varangéville à Lunéville, de Rose a évolué longuement au-dessus de cette dernière ville pour le plus grand plaisir des nombreux spectateurs.

Avis à nos quêteuses

Nos quêteuses qui offriront jeudi les roses et oiseaux de France sont priées instamment d'être rendues à l' « Est républicain » à midi 45, le départ des voitures pour le plateau étant fixé à une heure précise.

Retraite et Concert

Une retraite aux flambeaux de toutes les musiques et fanfares de la garnison aura lieu sur la place Stanislas, le jeudi 14 mars, à neuf heures du soir.

La tenue des musiciens et des hommes en armes sera celle du dimanche sans épaulettes.

La réunion des musiques, fanfares, escortes et corvées aura lieu, à huit heures du soir, dans la cour de la caserne Thiry. Les officiers, adjoints aux commandants de service des 26e et s-çe, sont chargés d'assurer leur réunion et leur mise en ordre, tant au quartier que sur la place Stanislas, conformément aux ordres qu'ils recevront directement du lieutenant-colonel Lormeau, major de la garnison.

Le concert d'ensemble sera donné sur la place Stanislas. Il sera dirigé par M. le chef de musique de première classe Sablon, du 69e régiment d'infanterie.

Pendant le concert, les musiques et escortes seront rangées face à l'hôtel de ville dans l'ordre suivant, de la droite à la gauche : 1° peloton du 5e hussards, 2° fanfares des 8e d'artillerie et 5° hussards, 3° musiques des 79e, 37e, et 26e régiments d'infanterie, 4° deuxième peloton du 5e hussards.

A la fin du concert, les musiques exécuteront ensemble la « Marseillaise », puis tous les détachements, musiques, escortes, porteurs de flambeaux, feront un changement de direction à droite et dégageront immédiatement la façade de l'hôtel de ville.

Ils feront ensuite le tour de la place Stanislas pour venir défiler tous devant l'hôtel de ville, à l'exception du 26e qui défilera devant la préfecture. Le premier peloton de hussards ouvrira la marche pour le défilé et précédera les fanfares du 8e d'artillerie et de son régiment, tant sur la place qu'à travers la ville après la dislocation.

Le deuxième peloton fermera la marche pendant l'évacuation de la façade de l'hôtel de ville, s'arrêtera (sans suivre le défilé) à hauteur de la rue Stanislas, y a attendra la musique du 79e et la précédera ensuite dans son itinéraire du retour.

Les porteurs de flambeaux à cheval encadreront les fanfares ; les escortes d'infanterie et les porteurs de torches à pied défileront, ayant à leur tête un adjudant ; le 79e aura, en avant de l'adjudant, un peloton de vingt-quatre hussards et un maréchal des logis.

Les officiers adjoints aux commandants de service des 26e et 69e les officiers commandant les compagnies du service d'ordre se sont réunis mercredi au bureau de la place pour régler avec le lieutenant-colonel Lormeau les détails de la retraite aux flambeaux.

Nous sommes en mesure de publier l'itinéraire des retraites et d'indiquer que la dislocation s'effectuera, sans interrompre la marche, au fur et à mesure de l'arrivée de chaque musique devant la rue qu'elle doit prendre pour suivre l'itinéraire de sa retraite particulière.

ITINÉRAIRE DES RETRAITES

26e D'INFANTERIE. — Rue d'Alliance (arrêt devant la préfecture), rue Godron, rue Sainte-Catherine, quartier.

69e D'INFANTERIE. — Rue Héré, place de la Carrière, rue Braconnot, rue Sigisbert-Adam, boulevard de la Pépinière, quartier.

37e D'INFANTERIE. — Rue des Dominicains, rue Saint-Jean, rue du Faubourg-Saint-Jean, rue Jeanne-d'Arc, avenue de la Garenne, rue Blandan, quartier.

79e précédé du peloton de hussards. — Rue Stanislas, rue du Faubourg-Stanislas, place de la Comman.derie, rue de Villers, rue Blandan, Quartier.

FANFARES. — Rue Gambetta, rue Saint-Dizier, rue du Montet, avenue de la Garenne, dislocation au-carrefour de la rue Jeanne-d'Arc, quartier.

La mairie nous communique :

« Attendu qu'il y a lieu de prescrire des mesures d'ordre à l'occasion d'une retraite aux flambeaux qui doit avoir lieu le jeudi 14 mars 1912, le maire arrête :

Article premier. — La circulation des chevaux et de tous les véhicules, y compris les tramways, sera interdite sur la place Stanislas et dans les rues adjacentes, le jeudi 14 mars 1912, à partir de huit heures un quart du soir et jusqu'à la fin de la retraite aux flambeaux.

Article 2. — M. le commissaire central de police est chargé d'assurer l'exécution du présent arrêté. »


BmN Kiosque lorrain

L'Est républicain du vendredi 15 mars 1912

Une belle journée patriotique

50.000 personnes acclament nos soldats

14 mars. — La revue de jeudi a répondu à toutes les espérances, à tous les vœux des patriotes lorrains ; elle fut une des plus belles qui se soient jamais déroulées dans le cadre magnifique du plateau de Malzéville, mais procédons par ordre chronologique.

LA MATINÉE

Nancy s'est éveillée jeudi matin dans l'anxiété du temps qu'il pourrait faire.

En effet, le soleil est l'accompagnement espéré de toute fête militaire. Bien que le ciel d'abord très clair se fût assombrie, la matinée s'est passée sans pluie.

LES PREPARATIFS

A Saulxures et à Pulnoy, au cantonnement des compagnies du 2e bataillon de chasseurs de Lunéville, ce fut dès les premières heures de la matinée la rumeur joyeuse d'un cantonnement On donnait aux « cuirs » un dernier « coup de torchon » et les blancs boutons d'uniforme étaient scrupuleusement astiqués.

Comme nous l'avions annoncé, les régiments de la 2e division de cavalerie ont quitté Lunéville dès l'aube.

Nombreux furent les Lunévillois qui s'arrachèrent au sommeil pour admirer le défilé, sur leurs rues caillouteuses, des chasseurs à cheval et des dragons-lanciers aux flammes éclatantes.

Et dans les casernes de Nancy, c'était le branle-bas de combat, cette agitation juvénile, d'une bonne humeur si française que connaissent tous ceux ayant passé par le régiment : revue du, caporal, revue du sergent, revue de l'officier de service, revue du capitaine.

Enfin Dumanet, bien lavé, bien rasé, tiré à quatre épingles, superbe, répond dans la cour à l'appel de son nom.

Et tambours battant, clairons sonnant, drapeaux déployés, les troupes se dirigent vers le terrain de la revue.

L'EXODE

Bien avant midi, ce fut, vers le plateau de Malzéville, l'exode de tout un peuple. Les cars de la ligne de Malzéville, si paisibles d'ordinaire, étaient formidablement bondés. Et tous les véhicules disponibles de Nancy avaient été réquisitionnés. On payait un louis le plus modeste des fiacres... sans compter un généreux pourboire, à l'avenant.

Rue Grandville, rue Ville-Vieille, le flot de la foule ne cesse de couler. Et les wattmann avaient grand mal à tourner leurs « manivelles », serrés qu'ils étaient par une compacte grappe humaine. Jamais nous n'avons mieux compris l'expression « Entassés comme des harengs dans une caque ».

Place Saint-Epvre, devant la basilique, défile le général Gœtscby et son imposante escorte.

Au dernier rang du 5e hussards marche un petit bonhomme en casquette montant un invraisemblable animal gris-pommelé. C'est sans doute le fils de quelque cantinier ou maître-ouvrier du régiment qui s'exerce au métier des armes

Nous remarquons avec plaisir qu'un certain nombre de nos concitoyens ont arboré leurs drapeaux. Les couleurs nationales flottent aux maisons de la place Stanislas, rues Saint-Dizier, Saint-Georges et Saint-Jean.

Sur le pont de Malzéville

De mémoire de Malzévillois, jamais leur vieux pont de pierre n'avait vu passer tant de monde que jeudi.

On avait eu beau mettre des tramways supplémentaires, ils ne suffisaient pas à la tâche.

Dès onze heures et demie, le service d'ordre traversait le pont pour se rendre au plateau. Les hommes n'avaient pas le sac.

Mais, entre une heure et deux, le mouvement de la foule fut intense. Voici des familles entières entassées dans des breaks, dans des autos. On se montrait le général Cherfils, du cadre de réserve, à cheval, coiffé d'un petit chapeau mou ; le général Gauthier, du cadre de réserve également, en auto.

L'intendant militaire Savoye, de belle allure, précédait le général Aubier, commandant la cavalerie du 20e corps, suivi d'un seul « houzard » de première classe.

On admira tout un flamboyant état-major d'artillerie, rouge et or. Le médecin principal Boppe, de l'hôpital militaire, montait un solide cheval gris et, parmi tous ces officiers coulait un ruban ininterrompu de foule, ouvriers, bourgeois, midinettes.

Du pont, on apercevait la foule gravissant la rude pente du plateau par le chemin stratégique, mais quantité de curieux empruntaient aussi la vieille route si pittoresque qui longe l'église de Malzéville.

De Malzéville au Plateau

Le général Gœtschy s'engage, à une heure et demie, dans les rues de Malzéville. Les fronts, à son passage, se découvrent. L'escorte éprouve beaucoup de peine à se frayer un étroit chemin dans la cohue sans cesse accrue. Les difficultés, les complications augmentent encore, quand les cavaliers du 5e hussards essaient ensuite défendre les flots compacts de la multitude.

A la hauteur de Trianon, nous sommes arrêtés par un inextricable encombrement d'autos, de breaks, de landaus, de calèches. Les cochers, les chauffeurs ne savent à quel saint se vouer ; ils s'interpellent, agitent des bras désespérés, échangent des lignes pour annoncer qu'il faut ralentir, stopper ou reprendre lentement la marche en avant. Une épouvantable odeur d'essence, une opaque fumée chargent l'atmosphère ; les roues des véhicules s'engluent dans les ornières.

Enfin, tant bien que mal — et plutôt mal que bien — nous échappons au Charybde des voitures et au Scylla des limousines et, cette fois, hors de tous obstacles, nous atteignons avec une facilité relative le- débouché de la Gueule-du-Loup.

SUR LE PLATEAU

Il est une heure et demie et les curieux affluent toujours. De la Gueule-du-Loup, le long des bois de Dommartemont, c'est non point un défilé, mais une course précipitée des retardataires en de véritables bousculades, des interpellations joyeuses, des lazzis de circonstance. On ne se plaint même pas des écarts rapides qu'impose l'intrusion d'un fiacre ou d'une auto dans les rangs qui restent sourds jusqu'au moment où les roues viennent les frôler. Des bicyclistes poussent péniblement leur bécane à la main, de braves papas ont remplacé la maman derrière la voiturette de l'enfant.

Du côté des raidillons de Malzéville, le spectacle est aussi pittoresque. Des groupes arrivent par toutes les issues et les « défense de passer » des sous-bois sont ironiquement méprisés.

Ça et là, des caisses et des caisses de bière s'entassent et commencent à se vider. Il faut bien arroser cette patriotique promenade.

Enfin, tout Le monde est à peu près « casé ». L'espace n'est point trop mesuré, d'ailleurs, et le plateau est décidément bien fait pour de pareilles cérémonies, avec ses quelques kilomètres d'étendue, dans un cadre idéal dont les sapins verts et les futaies encore dégarnies par l'hiver forment les contours.

Mais l'instant solennel approche. Un silence relatif s'établit. Les privilégiés des autos et des voitures les transforment en belvédères en se mettant debout dessus. Les premiers rangs de curieux à pied s'obstinent à garder leur place, en serrant de plus en plus les factionnaires. Les derniers rangs s'efforcent d'échanger leurs places contre des « premières ».

LES TROUPES SE PLACENT

Pendant ce temps, les troupes arrivées sur le plateau depuis le matin, prennent leurs emplacements pour la revue. Les officiers montés, l'état-major arrivent jusqu'au chemin dit des « pommiers », sans doute parce que des noyers surtout le bordent, et qui unit la Gueule-du-Loup à la route stratégique, en passant devant la ferme.

Deux heures 1/4. Une sonnerie. Escorté de hussards le général Gœtschy, commandant le 20e corps, que l'on apercevait depuis un instant vers les derniers arbres de l'allée des pommiers, s'avance pour l'inspection des troupes, que lui présente le doyen des généraux présents, le général de Mas-Latrie.

La revue se passe assez rapidement. On entend successivement les refrains des « vitriers », la « Marseillaise » des musiques d'infanterie, les sonneries réglementaires des cavaliers, au fur et à mesure que le commandant en chef arrive devant le front de chacun de ces onze bataillons ou régiments.

IMPRESSIONNANT SPECTACLE

Des points divers que le public était invité à ne point dépasser, le spectacle était impressionnant et superbe de ces belles troupes d'avant-garde, symétriquement rangées en une immobilité impeccable et un alignement parfait. Aviec leurs chefs, tous les patriotes qui sont venus les admirer ont pu leur dire, du fond du cœur : « Soldats, nous sommes contents de vous ».

LE DÉFILÉ

La revue est à peine terminée, que fantassins de la ligne ou de la légère ; que batteries roulant leurs tonnerres ou escadrons dignes dies héroïques chevauchées, font demi-tour ou par le flanc, et vont prendre leurs places pour le défilé.

Il a lieu derrière le « signal », au grand déplaisir des curieux rassemblés du côté de la ferme, mais pour le plaisir parfait, en revanche, de ceux qui sont demeurés vers Le chemin des « pommiers », et qui se trouvent là aux premières loges. Il y a de véritables grappes humaines dans les arbres de l'allée.

L'ancien système valait mieux et le public avait suffisamment montré par sa discipline qu'il ne méritait pas d'être envoyé aussi loin.

Honneur aux « vitriers » ! Ce sont eux qui forment pour ainsi dire le lever du rideau. Aux accents endiablés de leur « Sidi-Brahim », ils passent avec une crânerie superbe, avec cet entrain particulier dont ils sont si légitimement fiers. Oh ! comme cette marche alerte a quelque chose de bien français rt fait songer à notre légendaire furia ! Bravo ! Bravo ! avec toute la foule qui vous admire et vous applaudit, braves petits chasseurs de Lunéville et de Saint-Nicolas !

Les fanfares se sont tues. Les deux bataillons dégagent rapidement le terrain. C'est que déjà commence le roulement des tambours d'infanterie ; les clairons, en un geste sec, que le flottement de leur petit pavillon rend si joli, annoncent leurs notes guerrières, et bientôt, sur un appel de La grosse caisse, toute la musique y va de son pas redoublé.

26e et 69e ; 37e et 79e les quatre régiments passent, tandis que la foule salue pieusement leurs drapeaux et se plaît à admirer leur martiale allure que pas un à-coup, pas une indécision ne vient troubler. A eux aussi l'on peut dire : « Nous sommes contents de vous ! »

L'artillerie n'obtient pas un succès moindre. C'est que l'on a réellement grand plaisir à voir défiler ces pièces bleues, dams une correction admirable, les attelages bien en main des conducteurs, les servants correctement assis sur les caissons, sans, un accroc, sans un heurt, malgré le sol un peu détrempé et toujours caillouteux.

La cavalerie a été aussi très admirée.

Ah ! comme elle voudrait déjà fondre sur un invisible ennemi avec la fougue des vingt ans, sabre au clair et penchée sur les encolures ! Mais il faut au contraire que les cavaliers modèrent l'impatience de leurs coursiers car le moment n'est pas encore venu de la charge. En attendant, nous avons pu admirer plus à loisir toute la beauté de ces vigoureux escadrons et notre éloge et nos remerciements les unissent aux fantassins, leurs frères.

A noter aussi que c'est la cavalerie qui a déifié la première, contrairement aux habitudes, puis l'infanterie et enfin l'artillerie.

Voilà un aéroplane !...

A 2 heures 20, une immense clameur retentit :

— Un aéroplane !

On croit d abord à une plaisanterie. Les yeux cherchent un point noir dans le ciel ; les lorgnettes fouillent ; les curieux hissés sur les plus hautes branches des arbres à chercher l'oiseau mystérieux. Peine inutile. On ne distingue rien.

Pourtant, la clameur s'obstine et grandit :

— L'aéroplane !

Soudain, un monoplan apparaît. Il s'avance contre le vent. Déjà, on entend le ronflement des hélices ; puis, une fine silhouette se dessine, très nette, sous les ailes étendues qui profilent leur ligne mince sur l'uniformité grise du ciel.

Chapeaux, casquettes s'agitent. Une formidable ovation retentit. De toutes les poitrines, que semble délivrer d'une oppression la venue de ce monoplan, jaillit un interminable cri de :

— Vive l'armée !

Nous renonçons à décrire l'inoubliable spectacle que présenta alors le plateau de Malzéville. Un peuple entier vibre, du même frisson. Au-dessus des pelotons immobiles, montés sur leurs chevaux aux jarrets nerveux, le monoplan passe à la hauteur d'environ dent mètres.

Un officier nous renseigne :

— C'est le lieutenant aviateur de Rose, qui est parti librement de Lunéville pour nous rendre, visite... On avait répandu la nouvelle que le ministère de la guerre avait donné à quatre Bréguet l'ordre de quitter le camp de Mourmelon pour aller à Nancy. C'est un bruit inexact... Félicitons-nous de la belle et patriotique intention de notre camarade de Rose qui a goûté la joie d'une incomparable récompense en écoutant les ovations, les acclamations de cinquante mille personnes. »

Ayant fait deux fois le tour de son immense piste, le lieutenant de Rose se décide à atterrir. Les nélices s'arrêtent. L'appareil descend gracieusement en vol plané, piquant droit sur les baraquements militaires.

A peine est-il à terre que de nombreux officiers se précipitent vers lui, lui prodiguant les marques de la plus vive sympathie. L'aviatrice nancéienne, Mlle Marvingt, venue à cheval en costume d'amazone, tient également à le saluer et a le féliciter pour le succès du raid qu'il a si parfaitement réussi.

Le vaillant officier se dirige vers les baraquements où un l'acclame un public enthousiaste. Il accepte volontiers de vider avec ses amis une bouteille de bière et il assiste ensuite aux préparatifs de la charge.

Un peu après quatre heures, l'oiseau de France reprend son vol, et à une grande hauteur, se dirige vers Toul.

LA CHARGE

La charge ! Tout le monde est impatient de voir la charge. Dans cette parade militaire, le public est un peu comme au théâtre, à quelque pièce qui a réussi à le passionner. Il ne rêve qu'à la suite, il ne rêve qu'au dénouement, il ne rêve qu'à l'apothéose.

Et la charge, telle qu'à bien voulu cette fois l'ordonnancer le général Gœtschy, est bien réellement une apothéose.

Les trompettes soudain strident. Les premiers escadrons apparaissent. Hussards, chasseurs, dragons, foncent comme une trombe, dans un cliquetis de fourreaux et de gourmettes, dans un fourmillement de lances, dans un sourd résonnement du sol...

— Que c'est beau ! Que c'est beau !...

Les spectateurs ne trouvent d'abord pas d'autre expression de leur admiration...

Mais bientôt s'élève un immense cri de : Vive l'armée ! tandis que les cinq régiments, sur un ordre qui vole d'escadrons en escadrons, s'arrêtent net à quelques pas du général en chef et des premiers rangs des spectateurs.

— Ah ! que c'est beau. !... s'écrie une brave femme à nos côtés. Et elle pleure... C'est une Alsacienne, venue tout exprès des environs de Saverne, pour assister à la revue française...

Un accident à signaler. A l'arrêt, un cheval de dragon bute et tombe la tête en avant.Il est assommé sur le coup. Son cavalier heureusement que de légères contusions.

Mais n'est-ce pas la sonnerie bien connue de notre infanterie qui retentit à présent du côté du « Signal » ? Les fantassins sont-ils jaloux des lauriers des cavaliers leurs camarades ?... A Leur tour, les voici...

Baïonnette inclinée sur la gauche, l'arme serrée amoureusement contre la poitrine, toute la 11e division s"avance, flanquée des deux bataillons de « vitriers », avec les musiques et les fanfares au centre.

Elle est massée en bataille... Et quelle plume pourrait décrire dignement l'impressionnant spectacle de cette forêt de baïonnettes, s'avançant au pas de charge, dans le fracas des cuivres et de tambours, dans l'émerveillement des cris, dans le brouhaha admiratif de milliers et de milliers de spectateurs, tandis que les Éclaireurs, d'Épinal, font un lâcher de pigeons-voyageurs.

Et tout ce spectacle est ponctué par le tonnerre de l'artillerie, dont tes pièces crachent des éclairs et dont les échos répercutent de col en col les furieux grondements. Car, on le sait, toutes les armes ont tenu à « donner » dans cette ruée finale. Après les cavaliers, les fantassins ! Après les fantassins, les artilleurs.

— Bravo à vous aussi, artilleurs, mes chers frères !... Votre mise en batterie a été rapide, foudroyante. Dégager les avant-trains et galoper en arrière des pièces pour les conducteurs ; bondir hors des caissons et prendre leur place de bataille pour les servants. Deux secondes et ce fut fait... Ce fut tout simplement admirable.

Malheureusement, votre tonnerre marque aussi la fin de la fête. Et ce fut dès lors, la pittoresque débandade des curieux. Les uns courent au plus pressé vers les provisions que débitent à l'envi des marchands avisés, ou que l'on a pris la précaution d'apporter dans le filet. Les dînettes s'improvisent de toutes parts sur le vaste plateau ou sous les sapins verts. On oublie pour une fois que le gazon est encore humide et l'on choque joyeusement le verre à la santé de nos vaillants troupiers et de leurs chefs, en attendant d'achever sa journée par une agréable promenade aux environs ou d’emboîter tout simplement le pas aux régiments qui commencent à redescendre à Nancy.

*

*  *

Telle fut, dans ses grandes lignes, cette belle, journée, toute d'espoir et de patriotisme, et qui mériterait d'avoir de plus fréquents lendemains.

Petites Fleurs et Cartes postale

Nos petites fleurs et oiseaux de France, vendus au profit de l'aviation, ont retrouvé leur habituel succès. Dès une heure, à Malzéville, les petites fleurs ornaient bien des corsages et des revers de vestons.

Le public a fait aussi le meilleur accueil aux cartes postales représentant le beau dessin de M. Dard et que les Imprimeries-Réunies avaient bien voulu éditer avec autant d'art que de désintéressement.

A une heure après-midi, un essaim gracieux de quêteuses envahissait les autos mises aimablement à notre disposition par l'obligeance des maisons Peugeot et Berliet.

Les quêteuses portaient un coussin écarlate sur lequel étaient épinglés les souvenirs de cette fête de l'aviation et de l'armée.

Partout une infatigable générosité récompensa leur zèle. Un capitaine des chasseurs glissa dans le tronc qu'elles lui présentèrent une piécette d'or, en y ajoutant un compliment des mieux tournés ; un galant magistrat osa même solliciter la faveur d'embrasser une quêteuse et la vérité nous oglige à dire que le baiser fut gentiment accordé.

Deux aviateurs de huit à dix ans, les petits Raymond Rachon et Jean More, vêtus de leur « combinaison « kaki », furent l'objet d'encouragements flatteurs dont leur recette a dû certainement se ressentir.

Nous avions installé au café de la Gueule-du-Loup un poste de réapprovisionnement ; mais les fleurs et les oiseaux furent vite épuisés jusqu'à la dernière corbeille :

— C'est dommage ! regrettèrent les quêteuses... Mais nous nous rattraperons pendant la retraite aux flambeaux. »

Sans craindre la fatigue, nos jeunes et dévouées collaboratrices recommencèrent en effet à présenter leurs éventaires pendant toute la soirée. L'une d'elles voulut même entreprendre le voyage de Lunéville sur une Berliet pour y porter ses roses de France.

La complaisance et l'empressement des « cavaliers » rendirent leur tâche agréable et plus facile.

Nos six automobiles, coquettement pavoisées de drapeaux, sillonnèrent les rues de Nancy jusqu'à minuit.

Les résultats de la journée ajouteront quelques billets bleus à notre souscription au profit de l'aviation militaire.

Dimanche prochain, nos jolies quêteuses prélèveront, à l'occasion de la Mi-Carême, une légère dîme que personne ne songera à leur refuser et Nancy prouvera, une fais encore, qu'au milieu même de ses joies, de ses folies, elle abrite dans son cœur une place où le sentiment garde toute sa fierté, toute sa générosité.

Nous ferons connaître, dans notre prochaine édition la recette de chaque tronc ; mais, d'ores et déjà, annonçons qu'à elles seules, Mlles Roosen, quêtant ensemble, ont recueilli la somme rondelette de 160 francs.

La rentrée des Troupes à Nancy

Le général Gœtschy, suivi du général de Mas-Latrie, du général Aubier, de l'intendant Savoye et de son état-major, a tenu à assister, devant le palais du gouvernement, une dernière fois de la journée, au défilé de la 11e division.

A 5 heures moins 10, le général de division Poline débouchait sur l'hémicycle de la Carrière et faisait défiler ses belles troupes.

Le 79e marchait en tête ; mais sa musique continua à le précéder, ce qui fit que les dernières compagnies se ressentirent naturellement un peu de son absence.

Aussi, M. le général Gœtschy donna-t-il l'ordre aux trois autres musiques de la division de faire défiler leurs régiments respectifs.

Le 37e passa, baïonnette au canon, l'arme sur l'épaule.

Après la 22e brigade, vint la 21e.

Le 69e rendait les honneurs conformément au nouveau règlement, c'est-à-dire au port de l'arme, officiers présentent le sabre.

Le nouveau « port d'armes » est d'ailleurs assez laid et nous sommes complètement de l'avis du colonel Reibeil, du 7e d'infanterie, à Cahors, qui propose de le remplacer par le premier mouvement de la charge à la baïonnette, c'est-à-dire l'arme placée devant le corps.

Le 26e a clôturé le défilé l'arme sur l'épaule.

Est-il besoin de dire que ce défilé a été très admiré par un public, aussi nombreux que sympathique.

Aussitôt terminé, le général Poline s'est porté à la rencontre du général Gœtschy qui l'a remercié.

La Retraite aux flambeaux

Plan des musiques sur la place Stanislas

Cette radieuse journée militaire a été clôturée par une superbe retraite aux flambeaux.

On sait combien nos concitoyens raffolent de ce spectacle. Aussi, Nancy était-il hier soir, en rumeur de fête. La retraite se déroula suivant le programme que nous avons indiqué, dans le cadre idéal de la place Stanislas.

Nous entendîmes ces vieux airs de gloire où passe l'âme héroïque de notre race, la vaillance du cœur français.

Ce fut d'abord l'air populaire de la « Marche Lorraine » ; puis, les fanfares de trompettes s'étant placées au centre des musiques, ce fut une heureuse association des cuivres qui rythma en notes éclatantes la furie d'une charge... Enfin, la « Marseillaise » retentit majestueusement. Mais d'où vient qu'en plein jour les fronts se découvrent pendant l'hymne national et qu'on l'écouta, hier au soir, sans qu'à de rares exceptions près, les auditeurs aient ôté leurs chapeaux ?

Chaque morceau de musique fut suivi de longs hurras. Les cris de : Vive l'armée ! éclatèrent Enfin, le départ des retraites, dans le reflet rougeoyant des torches, entraîna vers les casernes une foule enthousiaste.

Un Souvenir au lieutenant de Rose

Nous avons reçu de M. Steiner, photographe, place Stanislas, une lettre émouvante en sa simplicité, qui traduit fidèlement les sentiments des Nancéiens. Elle contient une idée, elle suggère un projet que la faveur populaire s'empressera d'adopter.

Monsieur le directeur,

Nous avons reçu aujourd'hui une visite imprévue : M. le lieutenant de Rose a plané quelques minutes au-dessus du plateau de Malzéville, où défilaient les belles troupes du 20e corps d'armée.

« L'arrivée du vaillant officier a été saluée d'unanimes acclamations. Tout le monde a senti au cœur un petit frisson. Eh bien, il faut que cette date du jeudi 14 mars se grave dans la mémoire du lieutenant de Rose et c'est afin de lui témoigner en même temps notre joie et notre gratitude qu'entre amis nous avons ouvert, ce soir, au café du commerce, une souscription à dix centimes.

« Nous étions dix-neuf quand cette proposition fut faite. Le produit de la souscription est donc de trente-huit sous. Je vous envoie cette somme.

« Que l' « Est républicain » appuie notre initiative, qu'il dise à tous les patriotes ayant comme nous éprouvé un frisson :

« Versez dix centimes seulement... et nous achèterons avec l'obole populaire un cadeau à l'aviateur qui compléta si heureusement la revue de nos forces militaires... Le résultat ne se fera pas longtemps attendre. »

*

*  *

N'est-ce pas que l'idée, simple et noble, mérite un accueil favorable ? L' « Est républicain », pendant le Circuit de l'Est, proposait qu'après la première visite des aviateurs militaires à la frontière, le 11 août 1910, la croix fût attachée à la poitrine du lieutenant Camermann.

A la même époque, l' » Est républicain » proposait d'offrir au vénérable abbé Faller, curé de Mars-la-Tour, une vitrine pour son musée et un souvenir pour lui-même.

Le lieutenant Camerman était deux jours plus tard, porté au tableau de concours pour la Légion d'honneur et la souscription en faveur de l'abbé Faller dépassait, en trois ou quatre jours, toutes nos espérances.

En ces deux circonstances, notre journal avait été l'interprète de l'opinion publique.

Nous sommes certains que le patriotisme de nos lecteurs comprendra cette fois encore la pensée qui nous guide.

Pendant trois jours seulement, c'est-à-dire jusqu'à dimanche soir, un tronc sera placé dans notre Salle des dépêches pour y recueillir les pièces de dix centimes de tous les Nancéiens ayant éprouvé, selon l'expression même de M. Steiner, le « petit frisson », en admirant le monoplan du lieutenant de Rose.

A quel cadeau-souvenir affecterons-nous le produit de cette souscription, c'est ce que, d'accord avec nos lecteurs, nous déciderons lundi prochain.

Ceux même qui ont versé déjà des pièces d'or pour enrichir d'avions nouveaux la défense nationale, n’hésiteront pas à verser encore deux sous pour l'officier par qui nous fut donné à Malzéville un spectacle réconfortant et si plein d'espoir.



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